Lors de ma précédente vie
Je ne vis
Rien que massacres fusillades
Et tueries
Papa revenait le soir une fronde à la main
Maman lui disait mange ta soupe tais-toi et tiens-toi bien
Je n'ai retenu de ce temps
Qu'un refrain
Qu'elle nous chantait volontiers en
Nous tenant la main
Les voisins et le curé venaient à la veillée
Et jusqu'à minuit sonnant on chantait tous gaiement

Poil au nez poil au bras poil à la myrtille
Si tu veux une fille
Montre-lui que t'as aussi du
Poil aux genoux poil au front poil à la pastille
Car c'est bien connu toutes les femmes préfèrent les poilus

A vingt ans j'eus un métier neuf
Tondeur d'oeufs
La concurrence n'existait pas
Je étais le roi
Je tondais les oeufs de hibou même ceux des kangourous
Tous patibulaires en diable avec du poil partout
Je tondais les petits oeufs de saumon
Du Piémont
Les oeufs d'escargot de Russie
Comme des vessies
Je devenais de plus en plus riche
Et dès cinq heures du matin
Patiemment je leur tondais les miches
En chantant ce refrain

Poil au nez poil au bras poil à la coquille
Si tu veux une fille
Montre-lui que t'as aussi du
Poil aux genoux poil au front poil à la cheville
Car c'est bien connu toutes les femmes préfèrent les poilus

En 1789 tondeur d'oeufs
Était un métier noble
Et sans pitié
Un ignoble un avorton
Un dénommé Danton
Aussi poilu qu'un frigo
M'annonça tout de go
Hormis les oeufs de prolétaire
Rien à faire
Les nobles culs aux oeufs cossus
Seront cousus
J'ai répondu citoyen
Tu me fais mal au coeur
Écoute plutôt ce refrain
Et reprenons en coeur

Poil au nez poil au bras poil à la myrtille
Si tu veux une fille
Montre-lui que t'as aussi du
Poil aux genoux poil au front poil à la pastille
Car c'est bien connu toutes les femmes préfèrent les poilus